Que dit le jugement des prud'hommes?
Le conseil des Prud'hommes de Mantes-la-Jolie a validé le licenciement pour faute grave d'une salariée voilée dans la crèche associative Baby Loup. Le jugement a reconnu "l'insubordination caractérisée et répétée" de cette employée. En décembre 2008, de retour d'un congé parental, elle avait fait part à la directrice de l'établissement de sa volonté de porter le voile. L'employée, qui avait le statut de directrice-adjointe, avait alors été mise à pied puis licenciée pour faute grave le 19 décembre 2008. Le règlement intérieur de la structure interdit le port de signes religieux au nom du principe de "neutralité". Dénonçant un licenciement abusif, elle avait saisi le conseil des prud'hommes et réclamait plus de 80 00 euros de dommages et intérêts.
Qu'est que cette décision va changer dans les entreprises?
"Le jugement s'oriente vers une extension du principe de laïcité à toutes les entreprises. Le tribunal des Prud'hommes reconnait qu'il est licite qu'une société privée institue un règlement intérieur qui restreint la liberté religieuse et protège la neutralité", explique Yves Nicol, avocat en droit du travail. Jusqu'à présent, les entreprises pouvaient indiquer dans leur règlement intérieur la tenue de travail que devaient porter leurs salariés mais n'avaient pas le droit d'interdire clairement le port du voile ou tout autres signes religieux ostentatoires. "Mais il faut rester très prudent: ce n'est qu'une décision de première instance; son poids est donc très limité. Il faudra attendre la décision de la Cour d'Appel pour parler véritablement de jurisprudence", poursuit l'avocat.
Cette décision est-elle inédite?
"Dans la méthode oui, pas dans les faits, assure Yves Nicol. Il existe de nombreuses décisions de justice sur le port du foulard en entreprise mais c'est la première fois qu'un tribunal s'appuie sur le principe de laïcité pour valider le licenciement. Les précédentes décisions de justice s'appuyaient sur l'article L.1121-1 du Code du travail selon lequel 'Nul ne peut apporter aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives de restrictions qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche à accomplir ni proportionnées au but recherché'. Selon ce principe, si le salarié est en contact direct avec des clients ou un public qui peut être gêné ou choqué par ces signes religieux, l'employeur est en droit de d'interdire le port de signes religieux ostentatoires. Les cours d'Appels de Paris et de Versailles ont, par exemple, justifié l'interdiction du port du foulard islamique à une vendeuse dans un centre commercial et à une technicienne de laboratoire car elles étaient souvent en contact avec des clients. Le résultat est le même mais la démarche est très différente".
Tous les signes religieux sont-ils désormais interdits dans les entreprises?
Comme les employés des services publics, les salariés du privé soumis à cette règle, n'auront pas le droit de porter de signes religieux ostentatoires. Une chaine discrète avec une croix, une étoile de David ou une main de Fatima autour du cou sera, par exemple, autorisée, mais elle ne devra pas être trop visible.
Source: L'Express.fr
Voir l'article: http://www.lexpress.fr/emploi-carriere/emploi/ce-que-l-affaire-baby-loup-va-changer-dans-les-entreprises_945143.html
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