Prise d'acte de la rupture : les manquements de l'employeur doivent empêcher la poursuite du contrat
La prise d'acte par le salarié de la rupture de son contrat de travail ne produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse que si les faits reprochés à l'employeur sont suffisamment graves pour empêcher la poursuite de ce contrat.
Selon une jurisprudence désormais bien établie, la prise d'acte de la rupture de son contrat de travail par le salarié produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse dès lors que les faits invoqués sont suffisamment graves (notamment : Cass. soc. 19 janvier 2005 : RJS 3/05 n° 254 ; 9 mai 2007 : RJS 7/07 n° 843).
Dans son arrêt du 30 mars 2010, la chambre sociale de la Cour de cassation apporte, pour la première fois à notre connaissance, une précision importante : ces faits d'une gravité suffisante s'entendent de ceux qui empêchent la poursuite du contrat.
La solution est rendue à propos d'un salarié qui s'était porté candidat au départ volontaire, dans le cadre d'un plan social, afin d'occuper le poste proposé par une autre entreprise. Il avait pris acte de la rupture du contrat de travail au motif que son employeur ne lui avait pas répondu en temps utile sur cette candidature et l'avait ainsi tenu dans l'ignorance de son avenir professionnel. Il entendait obtenir, en conséquence, le paiement d'indemnités pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
La cour d'appel a fait droit à sa demande estimant que ce manquement de l'employeur était suffisamment grave pour fonder la prise d'acte. Sa décision est censurée par la Haute Cour. Cette dernière relève, dans un attendu de principe, que l'objet de la prise d'acte est de permettre au salarié de rompre son contrat lorsque les faits reprochés à l'employeur font obstacle à la poursuite de ce contrat. Tel n'était pas le cas en l'espèce, le différend opposant le salarié à son employeur concernant les modalités et les conditions de la rupture.
Ainsi, tout manquement de l'employeur ne justifie pas la prise d'acte. Si la condition précitée n'est pas remplie, cette dernière équivaut à une démission.
Soulignons que le salarié privé de la possibilité de trouver un autre emploi du fait de l'employeur n'est pas dépourvu de tout recours. Il peut en effet demander l'indemnisation du préjudice que lui a causé la défaillance de l'employeur en l'excluant à tort d'un dispositif prévu dans le plan social et destiné à favoriser des départs volontaires (en ce sens : Cass. soc. 30 novembre 2004 : RJS 2/05 n° 144 ; 27 novembre 2007 : RJS 2/08 n° 162)
Cass. soc. 30 mars 2010 n° 08-44.236 (n° 686 FS-PB) Sté Bio rad laboratoires c/ Rieunier-Burle
Source: © 2010 Editions Francis Lefebvre
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